La baisse des subventions des conservatoires sous les dorures du palais du Luxembourg

Territoires

Si le désengagement de l’État dans le financement des CRD et CRR ne faisait guère de doute pour les professionnels que nous sommes, force est de constater la faible mobilisation des élus locaux en charge d’équipements culturels dont ils supportent pourtant la plus grande part financière.

C’est donc avec intérêt que nous avions pris connaissance de la question adressée en février 2013 à la ministre de la Culture et de la communication par M. Dominique Bailly , sénateur socialiste du Nord-Pas-de-Calais, lui faisant valoir que les désengagements successifs de l’État représentaient l’équivalent du financement de trois postes d’enseignants du conservatoire de Caen !

Dans sa réponse en date du 20 mars 2014, la ministre indique que son ministère a été contraint, compte tenu des contraintes budgétaires qui pèsent sur ses crédits, de réaliser une économie sur l’enveloppe dédiée aux conservatoires à rayonnement régional ou départemental, n’omettant pas de rappeler au passage que, depuis la loi de décentralisation de 2004, ces établissements n’entrent plus dans le champ de compétences obligatoires de l’État.

On sait ce qu’il en a été de la situation de blocage de cette loi et surtout, que les transferts de crédits initialement prévus en direction des régions et des départements n’ont pu être effectués alors que les sommes en jeu représentaient près de 28,5 millions d’euros (valeur au 1er janvier 2005…).

Rappelons encore, pour mémoire, que dans sa réponse à une question orale posée au Sénat par C. Morin-Dessailly en juillet 2012 , A. Filippetti indiquait vouloir « sortir de l’impasse » dans laquelle se trouvait cette loi de 2004.

A ce titre, elle promettait de « s’appuyer sur les résultats du dialogue renoué avec le Conseil des collectivités territoriales pour le développement culturel (CCTDC) au sein duquel un groupe de travail devait spécifiquement être consacré aux enseignements artistiques. »

Nous ignorons si ce groupe de travail a été constitué en définitive et si le CCTDC s’est réuni depuis, mais il est a souligné qu’il n’a plus jamais été fait référence à cette instance dans les prises de décisions qui ont conduit aux baisses très importantes des crédits en question ainsi qu’à la formulation de critères d’attribution de ces derniers.

Dans sa réponse du 20 mars 2014, la ministre rappelle, tout en restant très laconique quant aux montants, quels sont les crédits que l’État allouera aux conservatoires classés et selon quels critères :

  • Maintien de l’aide au niveau actuel aux conservatoires qui participent à un projet de pôle d’enseignement supérieur ;
  • Maintien d’une aide au fonctionnement qui sera calculée au prorata du nombre d’élèves ;
  • Mise en place en 2014, compte-tenu de l’implication des conservatoires dans les politiques locales d’éducation artistique et culturelle, d’un fonds national de 2 M€ destiné à accompagner les projets exemplaires des conservatoires dans ce domaine. Il sera alloué par les directions régionales des affaires culturelles au soutien des initiatives remarquables dans ce domaine.
  • Maintien de l’allocation d’aides individuelles, en particulier pour les élèves en fin de cycle spécialisé.

A ce jour, les directions régionales des affaires culturelles ne semblent pas disposer de tous les éléments leur permettant d’annoncer quel sera le montant de la subvention effectivement versée aux collectivités en 2014, alors que les budgets ont en général été votés sur la base des crédits 2013 avec prise en compte du montant de la baisse de 31,57% annoncée dans le projet de loi de finance. Il est probable que des décisions modificatives pouvant être douloureuses sont à prévoir en fin d’exercice !

Notons enfin que l’avant-projet de Loi d’orientation relative à la création artistique dans les domaines du spectacle vivant et des arts plastiques (LORCA) vise à clarifier les dispositions de l’article L 216-2 du Code de l’éducation, article qui est issu de la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales. Les dispositions de cet article concernant la mise en œuvre d’un Cycle d’enseignement professionnel initial (CEPI) dont on sait qu’elle est restée très largement inappliquée.

Ces dispositions reprennent, au mot près, les conclusions du protocole d’accord conclu en 2009 entre l’ARF, l’ADF, l’AMF, l’AMGVF et l’État. Ne manque que la référence à l’article L 216-2-1 de ce même code de l’éducation qui prévoyait de transférer par convention aux départements et aux régions, les concours financiers que l’État accordait aux communes pour le fonctionnement des écoles nationales de musique, de danse et d’art dramatique et des conservatoires nationaux de région…

Comme cela a été indiqué il y a quelques semaines, la présentation de ce projet de loi au Parlement ne pourra intervenir, au mieux, avant l’automne prochain. Peut-on alors formuler le vœu que la concertation avec l’ensemble des partenaires (CCTDC, associations d’élus, Conservatoires de France, …) reprenne et que l’État assure enfin le pilotage d’un dossier qui a subi de trop nombreux avatars depuis 2004 !