Kévin, le retour : lettre ouverte à Vincent Peillon

Territoires

Monsieur le Ministre,

Il y a une dizaine d’année, j’ai écrit une lettre au Président de la république pour lui exposer mes interrogations de petit garçon devant les reports de journées de classe sur le mercredi, jour de mes activités à l’école de musique. Il a sans doute jugé cette lettre trop naïve pour y répondre…

J’ai aujourd’hui vingt ans, je suis toujours musicien et joue de la clarinette dans l’harmonie municipale de ma commune. Je poursuis des études en sport, et encadre bénévolement des activités sportives pour les enfants dans le club de judo de mon village.

Cette année encore, l’annonce de report de cours sur le mercredi va perturber le fonctionnement de notre club ; mais comme notre commune a choisi d’appliquer la réforme des rythmes scolaires et de passer à quatre jours et demi, ce sont quatre mercredis qui vont nous être supprimés, dont trois en pleine période de compétitions.

Mes amis musiciens de l’école de musique sont également catastrophés : comment préparer concerts, auditions, spectacles qui sont des moments forts, très importants dans la vie des élèves, si les élèves sont absents trois mercredis sur les sept que comptent les mois de mai et juin (les vacances de printemps, dans notre zone, se terminent le 12 mai). De même, comment vais-je pouvoir préparer mes jeunes judokas pour leurs compétitions dans ces conditions ?

Il y a dix ans, je pensais que le président de la république serait capable de mettre ses ministres d’accord… Aujourd’hui, je sais que ce n’est pas vrai. Alors je m’adresse à vous et peut-être pourrez-vous répondre à ma question : pourquoi dites-vous vous préoccuper de bien-être des enfants alors que vous faites tout le contraire ? Pensez-vous que la musique, le sport et toutes les activités du mercredi sont si peu importantes qu’on peut les traiter comme vous le faites ?

Ma maitresse de CM1 essayait de faire de nous des citoyens responsables : aujourd’hui, je comprends mieux ce qu’elle voulait dire, notamment quand elle parlait de respect de l’autre. Est-ce que les ministres ne devraient pas, eux aussi, se comporter en citoyens responsables et respecter le travail de tous ceux qui, dans les clubs sportifs, les écoles de musique, de danse, de théâtre, les centres de loisirs, les associations de toutes sortes encadrent les activités des enfants avec compétence, engagement, et souci de leur bien-être ?

Est-ce que dans dix ans je devrais écrire encore une fois, cette fois-ci en tant que jeune père, pour me plaindre d’une pratique qui, de génération en génération, continue de perturber la vie des jeunes enfants ?

Kévin

Lettre de Kévin au président (BN n°29 page 10)